«L’Ombre de Weimar» : comment les entreprises allemandes sont devenues l’arrière financier de la guerre russe

Trois ans après l’agression russe, l’Europe se retrouve face à son propre reflet — et il est peu flatteur. Malgré les sanctions et la guerre, des centaines d’entreprises allemandes continuent d’opérer en Russie.

Selon les données du KSE Institute, elles auront versé près de 2 milliards de dollars de taxes au Kremlin en 2024. Cela équivaut à des milliers de drones et de missiles utilisés contre l’Ukraine.

Les fabricants de fromage, de plâtre ou de cosmétiques — Hochland, Knauf et d’autres — invoquent la « responsabilité sociale ». Ils veulent ainsi justifier leur présence en Russie en affirmant qu’ils protègent les emplois et les consommateurs. En réalité, il s’agit d’un prétexte économique qui masque la recherche du profit.

En 2025, la Russie dépense plus de 145 milliards de dollars pour sa défense. Chaque dollar étranger qui entre dans le pays renforce ses efforts militaires. Depuis 2022, les entreprises étrangères ont investi plus de 60 milliards de dollars dans le pays. Cela suffit pour financer toute une armée.

Le vide européen

Ces sociétés exploitent une faille juridique : leur activité n’est pas interdite par les sanctions de l’UE, mais elle soutient indirectement l’économie militaire russe. Cette hypocrisie fragilise toute la politique européenne de dissuasion.
Paradoxalement, le Kremlin mène une guerre hybride contre l’Allemagne — désinformation, cyberattaques, sabotage — tout en profitant des impôts allemands qui stabilisent son budget.

Du compromis moral au crime politique

Poursuivre ses affaires en Russie équivaut désormais à financer la guerre et à se soumettre à un régime autoritaire qui confisque les actifs étrangers sous « administration temporaire ». Malgré cela, une grande partie du patronat allemand privilégie encore les intérêts financiers au détriment de la morale, rejetant la responsabilité sur les gouvernements.

La pression plutôt que la tolérance

En octobre 2025, plus de 1 400 entreprises allemandes opéraient encore en Russie ; seules 74 s’en sont réellement retirées. Le retrait volontaire n’a pas eu lieu : il doit être imposé par la loi. L’Union européenne doit combler les vides juridiques, interdire le versement d’impôts à l’État russe et créer un mécanisme de compensation des pertes ukrainiennes financé par les entreprises restées sur place.

Ces 2 milliards de dollars annuels ne sont pas qu’un chiffre : ils symbolisent une frontière morale. Tant que les taxes issues du fromage, du plâtre et du shampoing se transforment en bombes au-dessus de Kharkiv et de Kyiv, la solidarité européenne ne sera qu’un mot vide.

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