Dans plusieurs secteurs, l’IA change la nature du travail. Elle contrôle, elle corrige, et surtout elle impose son tempo. Dans un centre d’appels du nord de la France, les salariés de Concentrix suivent des règles strictes. L’entreprise interdit des « mots noirs » comme « problème », « malheureusement » ou « gaz ». Dès qu’un employé prononce un terme prohibé, l’algorithme envoie aussitôt une alerte aux manageurs.
D’après Le Monde, les entreprises leaders ouvrent la voie. Amazon et Teleperformance utilisent depuis longtemps des outils visant à analyser les conversations, suivre les écrans et mesurer le ton de la voix. Teleperformance s’appuie sur deux logiciels : TP Observer, qui enregistre les écrans et étudie les échanges ; et TP Interact, qui dissèque la voix des salariés. Les manageurs s’interrogent alors : « Sont-ils assez dynamiques ? Le client peut-il les entendre sourire ? »
L’entreprise précise pourtant que « ses dispositifs internes n’ont pas vocation à surveiller », mais les faits racontent une autre réalité. Car l’IA devient une véritable contremaîtresse. Elle évalue la performance, dicte la cadence, et donc réduit l’autonomie.
Ces pratiques se répandent, car elles promettent productivité et standardisation. Cependant, elles transforment aussi les conditions de travail. Elles créent un climat d’obéissance permanente, où chaque mot compte et où chaque silence se mesure. Ainsi, l’IA ne se contente plus d’aider : elle commande, elle norme, et elle redéfinit profondément ce que signifie travailler.
